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Shoten Minegishi

Moine bouddhiste de Soto Zen, Japon
 biographie

Personne ne se sauve seul – Paix et fraternité
Vénérable Shoten Minegishi
Directeur du Bureau Européen du Bouddhisme Soto Zen, Japon
Rome, place du Capitole, 20 octobre 2020
 


Sainteté, Eminences, Excellences, chers amis,

Je suis venu à Rome, malgré les nombreuses critiques qui m’ont été adressées en raison de la situation sanitaire, avec le coronavirus, et bien que je sois moi-même anxieux au sujet des déplacements et rassemblements de personnes. Je suis venu par amitié pour la Communauté de Sant'Egidio.
Un poète japonais, Akito Shima, poussé par la faim commit des vols et des meurtres. Il fut arrêté et condamné à mort. Tandis qu’il se trouvait dans les couloirs de la mort, il commença à écrire une poésie qui contenait les vers suivants : « Ici, dans les couloirs de la mort, mes mains ; les mains qui ont étranglé des personnes jusqu’à la mort composent maintenant des bouquets de fleurs. »
Cette poésie explique qu’au sein de la même personne peuvent exister le bien comme le mal. Elle nous dit que chacun de nous peut être bon, comme il peut aussi exercer le pouvoir mauvais qui est celui des armes : les paroles qui sortent de notre bouche peuvent blesser les autres. En fixant quelqu'un du regard, nous pouvons le blesser profondément. Nous tendons tous à créer des divisions entre les gens. Nous tendons à dénigrer les autres et à nous imposer sur nos rivaux. Décider de faire de nous-mêmes des armes relève de notre conscience.
Permettez-moi de citer quelques vers d’une autre poésie :
« Je suis dans les bras de la mort, assoiffé d’amour.   
Quelqu’un m’a donné quelques patisseries.   
Je dépose les patisseries sur le sol, dans l’attente que viennent les fourmis. »   
Je perçois dans cette poésie une caractéristique humaine fondamentale. Les êtres humains ont un besoin angoissant d’entrer en relation profonde avec les autres. Il est quasiment impossible pour un condamné à mort de rendre heureux quelqu'un d’autre, c’est pourquoi le prisonnier dépose par terre les patisseries, dans l’espoir de rendre heureuses les petites fourmis. Cette poésie affirme avec force que personne ne peut parvenir au bonheur, personne ne peut remplir son cœur sans entrer en relation avec les autres. Shima avait privé un homme de sa vie, et c’est pourquoi il laissa derrière lui ces paroles : « ne pas pouvoir compenser la perte de la vie de ma victime m’effraie ! »
Je suis engagé dans le dialogue interreligieux depuis longtemps. Je suis convaincu que les leaders religieux devraient mettre en œuvre une coopération très étroite afin que chaque personne, quelle que soit sa situation religieuse ou culturelle, puisse être accueillie dans son entiereté. Je suis aussi arrivé à la conviction profonde que la peine de mort est la négation de la dignité humaine. Et je suis aussi fermement convaincu que la violence et les guerres naissent du comportement des êtres humains. Donc, puisque l’homme est à l’origine des guerres, il peut aussi bien être à l’origine de la paix.
Je suis fermement convaincu que le dialogue est un chemin qui ouvre nos cœurs et nous permet de faire des pas vers les autres.
Permettez-moi de conclure mon intervention en disant : Désarmons ensemble nos cœurs et parcourons ce chemin, accomplissons un pas supplémentaire vers le monde que nous cherchons, un monde de fraternité et de paix !

Merci.