Teilen Auf

François Clavairoly

Präsident der Protestantischen Föderation Frankreichs
 biografie

La fraternité et l'hospitalité

 
La question des migrations est une question d'ordre spirituel.
Certes, nous connaissons tous les éléments historiques, économiques, sociaux et juridiques qui président à cette réalité ancienne et toujours d'actualité qu'est le phénomène migratoire. Ces éléments sont complexes et demandent, pour être bien évalués, une expertise, un professionnalisme, des règles, des procédures.
Toutefois, la question posée dans le cadre de notre rencontre prend un caractère spirituel :
  • il s'agit en effet de savoir à quel niveau se situe la réponse apportée à la détresse et aux initiatives périlleuses prises par ceux qui décident de tout quitter et de risquer leur vie pour éviter le cauchemar de leur situation présente.
    La réponse apportée est de l'ordre de la charité (caritas) ou de la compassion mais aussi de la fidélité à une parole reçue, celle de l'évangile.
     
  • la question posée est donc double :  elle est celle de la fraternité et celle de l'hospitalité.
1. La fraternité peut se comprendre sur le mode citoyen, républicain, séculier. Elle engage la responsabilité des acteurs sociaux, des élus, des associations, des pouvoirs en place. Elle est dépendante des politiques publiques et des choix des pays qui se sentent concernés par l'accueil. Elle est liée à un consensus et à des pratiques juridiques qui font le cadre d'un accueil possible. Elle résonne comme l'une des valeurs républicaine, du moins en France, mais aussi, nous l'avons vu avec admiration en Allemagne.
L'Europe a offert un visage très contrasté à cet égard, entre l'ouverture et la fermeture, entre la fraternité et le rejet.
 
2. L'hospitalité, pour sa part, engage des éléments de compréhension au plan religieux. Elle est une valeur importante, comme la fraternité, mais aussi et surtout présente et intense dans l'ensemble des traditions et des confessions religieuses, dans le coran, la bible et d'autres textes fondateurs.
L'hospitalité, lorsqu'elle se renie, se transforme en hostilité  (ces deux mots sont de même racine). L'hôte devient hostile et se révèle ennemi.
 
Ce qui est en jeu, dans cette réflexion, est donc l'articulation à mettre en œuvre entre d'une part une action politique partagée, citoyenne, publique, acceptée par les lois et les usages : « la fraternité », et d'autre part l'injonction prophétique, l'appel divin, la supplication de l'émigré qui recherche un asile, « l'hospitalité ».
Et la question posée est celle du lien possible à établir ou à inventer entre le niveau politique et le niveau religieux, le lien qui fait qu'une société est vraiment humaine, à la fois fraternelle et hospitalière.
Le projet des couloirs humanitaires en France conjoint dans son protocole tel qu'il a été établi et signé en France par la FPF, Sant'Egidio, la Fédération de l'Entraide Protestante, Caritas, la Conférence des Evêques de France et le ministère de l'Intérieur, ces deux dimensions, dans un contexte pourtant très laïc, et je me réjouis que cela ait été rendu rendu  possible.
Je voudrais, je souhaite que l'âme de l'Europe inspire les états et que, sans confusion, dans le cadre de la séparation des sphères de la religion et de la politique, une dynamique de compassion autorise l'action concertée afin que se réalise enfin une promesse, celle d'une citoyenneté européenne fraternelle et hospitalière, fondée dans le droit et dans la compassion, responsable et intelligente.
Les religions qui disent la paix au monde peuvent toutes entrer dans cette dynamique.
La puissance des évangiles et de la torah, le souffle du coran et l'intelligence des Lumières n'ont aucun intérêt à se contredire à ce sujet.
Ratio et Fides, la foi et la raison, la loi et la compassion, reliés par Caritas, ont un avenir dans notre monde.