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Jean-Arnold de Clermont

Pastor, Reformierte Kirche von Frankreich
 biografie

Sous ce titre, on peut retrouver l’idée de Jacques Attali, dans son livre « Une brève histoire de l’avenir », qu’un pays, un continent peuvent devenir des pôles économiques pour le monde entier, pôles atour des quels s’organisent l’ensemble des relations commerciales d’envergure ; Rome, Venise, Rotterdam, la Grande Bretagne, les USA, demain la Chine...
Reprenons au moins l’idée pour organiser notre propos et réfléchir ensemble au rôle que l’Europe peut jouer.

Les derniers événements qui ont frappé les esprits depuis six mois, qu’il s’agisse du conflit Russo-géorgien autour de l’Ossétie du Sud, ou qu’il s’agisse de la crise bancaire mondiale, donnerait raison à l’affirmation que l’heure de l’Europe serait arrivée. Et ne voyez dans cette hypothèse aucun désir de faire la promotion du président en exercice de l’Union Européenne. Mais le simple constat que, ce que beaucoup attendent des politiques européens depuis des années, ce qui est présumé dans le Traité de Lisbonne s’il est un jour ratifié par les 27, à savoir qu’il y ait une véritable politique commune de l’Europe, ce temps serait arrivé. L’Europe a parlé avec sagesse et autorité à la Russie et à la Géorgie, ainsi qu’aux USA ; l’Europe vient de pendre l’initiative d’une conférence internationale pour remettre le système financier mondial en état de marche et les USA, comme l’Asie semblent s’y rallier… De tout cela je me réjouis personnellement, mais comme l’hirondelle ne fait pas le printemps, de tels succès diplomatiques ne font pas encore « l’heure de l’Europe ». J’aimerais en dire ici et l’ambition et les conditions.

Le projet européen dans ses fondements  est un projet de réconciliation – au départ entre l’Allemagne et la France – et de paix, au service duquel des instruments économiques et politiques ont été mis en place progressivement. Ce projet doit rester la principale ambition de l’Europe en la faisant partager au reste du monde, de proche en proche. C’est parce que ce qui se passe dans le Caucase concerne toute l’Europe ; c’est parce que la paix du continent européen dépend pour une part importante de nos relations avec la Russie ; c’est parce que la paix du monde dépend pour une part importante de la paix au Moyen-Orient… que l’Europe doit avoir pour ambition le développement de relations de réconciliation et de paix avec toute l’Europe de l’est, tous les pays sur ses marches, l’ensemble du bassin méditerranéen et particulièrement le Moyen-Orient ? Cette ambition est contenue dans son projet fondateur, comme l’est celle de la justice sociale et économique.

Le développement économique, les progrès dans la lutte contre la pauvreté, depuis 50 ans, malgré toutes les inégalités qui demeurent, sont au cœur de l’ambition européenne. L’Europe doit répondre à cette ambition en parallèle à son ambition d’être une zone de réconciliation et de paix.
Mais qui dit développement économique dit « solidarité économique » et s’il est un continent avec lequel l’Europe doit être en solidarité économique c’est bien le continent Africain. D’abord parce que des liens historiques, très anciens, unissent l’Europe et l’Afrique. Pour le meilleur et pour le pire.  L’Europe ne peut ignorer la dette qu’elle a à l’égard de nombreux pays africains du fait de la traite dont elle a été l’un des principaux acteurs. Cette dette s’est accrue à travers l’exploitation des matières premières qui a fait une part importante de sa richesse (cacao, bois, arachide, richesses minières…). Mais plus encore ce sont les relations d’échanges de personnes qui donnent aujourd’hui une responsabilité décisive à l’Europe et exige d’elle une politique cohérente et généreuse dans le traitement des migrations.

Enfin l’Europe est un continent multiculturel, et j’inclus dans le multi culturel le multi religieux. C’est un atout sans pareil dans un monde tenté par la confrontation des ‘blocs’ et l’affrontement des religions.

Aussi pour répondre à l’interrogation de notre table ronde, je dirais l’Europe à toutes les capacités pour que ‘son heure soit arrivée’. Mais elle n’a encore pas montré sa volonté d’être pleinement au rendez-vous de l’histoire. Elle nous a donné des signes de sa capacité à agir de manière cohérente. Mais elle reste sur la défensive quant aux migrations au lieu d’en faire un instrument de développement coordonné ; elle peine à trouver sa cohérence politique notamment en matière de politique étrangère ; chaque pays veut jouer son propre jeu ; devant le conflit israélo-palestinien, elle reste à la remorque des Etats-Unis sans faire entendre sa voix…
Mais l’Europe, c’est qui ? Vous et moi, et bien d’autres certes. Les élections européennes auront lieu en 2009. C’est dans ce contexte qu’il nous faudra nous faire entendre pour que l’Europe soit à la hauteur de ses ambitions et de ses capacités. Alors seulement pourra-t-on parler de son ‘heure’.